Les anciennes dispositions sur la délégation de créances étaient lacunaires et la jurisprudence n’a pas comblé ces lacunes, notamment sur l’opposabilité des exceptions. L’ordonnance apporte des dispositions plus complètes, clarifie l’opposabilité des exceptions et modifie plusieurs points du droit positif antérieur.
Tableau des articles 1336 à 1340 sur la délégation de créances
Articles en vigueur au 1er octobre 2016 | Articles abrogés le 1er octobre 2016 |
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Art. 1336.- La délégation est une opération par laquelle une personne, le délégant, obtient d’une autre, le délégué, qu’elle s’oblige envers une troisième, le délégataire, qui l’accepte comme débiteur. Le délégué ne peut, sauf stipulation contraire, opposer au délégataire aucune exception tirée de ses rapports avec le délégant ou des rapports entre ce dernier et le délégataire. | Art. 1275.- La délégation par laquelle un débiteur donne au créancier un autre débiteur qui s’oblige envers le créancier, n’opère point de novation, si le créancier n’a expressément déclaré qu’il entendait décharger son débiteur qui a fait la délégation. |
Art. 1337.- Lorsque le délégant est débiteur du délégataire et que la volonté du délégataire de décharger le délégant résulte expressément de l’acte, la délégation opère novation. Toutefois, le délégant demeure tenu s’il s’est expressément engagé à garantir la solvabilité future du délégué ou si ce dernier se trouve soumis à une procédure d’apurement de ses dettes lors de la délégation. | Art. 1276.- Le créancier qui a déchargé le débiteur par qui a été faite la délégation, n’a point de recours contre ce débiteur, si le délégué devient insolvable, à moins que l’acte n’en contienne une réserve expresse, ou que le délégué ne fût déjà en faillite ouverte, ou tombé en déconfiture au moment de la délégation. |
Art. 1338.- Lorsque le délégant est débiteur du délégataire mais que celui-ci ne l’a pas déchargé de sa dette, la délégation donne au délégataire un second débiteur. Le paiement fait par l’un des deux débiteurs libère l’autre, à due concurrence. | |
Art. 1339.- Lorsque le délégant est créancier du délégué, sa créance ne s’éteint que par l’exécution de l’obligation du délégué envers le délégataire et à due concurrence. Jusque-là, le délégant ne peut en exiger ou en recevoir le paiement que pour la part qui excèderait l’engagement du délégué. Il ne recouvre ses droits qu’en exécutant sa propre obligation envers le délégataire.La cession ou la saisie de la créance du délégant ne produisent effet que sous les mêmes limitations.Toutefois, si le délégataire a libéré le délégant, le délégué est lui-même libéré à l’égard du délégant, à concurrence du montant de son engagement envers le délégataire. | |
Art. 1340.- La simple indication faite par le débiteur d’une personne désignée pour payer à sa place n’emporte ni novation, ni délégation. Il en est de même de la simple indication faite, par le créancier, d’une personne désignée pour recevoir le paiement pour lui. | Art. 1277.- La simple indication faite, par le débiteur, d’une personne qui doit payer à sa place, n’opère point novation.Il en est de même de la simple indication faite, par le créancier, d’une personne qui doit recevoir pour lui. |
Définition de la délégation (art. 1336, al. 1er).
L’ordonnance introduit une définition doctrinale de la délégation : un contrat tripartite engageant délégant, délégué et délégataire. La délégation crée une obligation nouvelle entre le délégué et le délégataire, distincte d’une cession de dette.
Distinction entre délégation parfaite et imparfaite (art. 1337)
La délégation est imparfaite si l’obligation du délégant persiste. Elle est parfaite (ou novatoire) si le délégant est libéré, créant une nouvelle obligation identique à la précédente mais avec un nouveau débiteur. Le délégant reste cependant tenu en cas de garantie de solvabilité du délégué.
Effets de la délégation imparfaite (art. 1338)
La délégation imparfaite offre une garantie supplémentaire au délégataire, ajoutant un second débiteur. Ce n’est pas une solidarité car chaque débiteur est tenu d’une dette distincte. Le paiement par l’un des débiteurs libère l’autre à due concurrence.
Impact sur la créance du délégant (art. 1339)
La délégation ne supprime pas la créance du délégant sur le délégué, sauf en cas de libération du délégant. Le délégant ne peut exiger le paiement que pour la part excédant l’engagement du délégué envers le délégataire. Si le délégant paie le délégataire, il recouvre ses droits d’agir contre le délégué.
Opposabilité des exceptions (art. 1336, al. 2)
L’article 1336, alinéa 2, clarifie que le délégué ne peut opposer aucune exception tirée de ses rapports avec le délégant ou entre le délégant et le délégataire, sauf stipulation contraire. Cette clarification met fin aux divergences de jurisprudence.
Différence entre délégation et indication de paiement (art. 1340)
L’indication de paiement ne crée pas d’obligation pour le tiers indiqué. Le créancier ne peut agir contre le tiers et doit accepter le paiement d’un tiers. Contrairement à la délégation, l’indication de paiement n’affecte pas l’obligation initiale.